Par Régis TRILLES le samedi 15 novembre 2008, 10:41 - France d'après - Lien permanent
Le cri d’alarme ne vient ni d’un élu local ni d’un militant associatif. Lancé par Yazid Sabeg, le président du comité d’évaluation et de suivi de l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), il révèle l’ampleur du désastre. Nommé à ce poste par Jean-Louis Borloo, alors ministre de la Ville, il critique vertement le désengagement de l’État qui, après avoir réduit sa subvention en 2008, a décidé, pour 2009, de se défausser du financement de l’ANRU sur le 1 % logement.
On sacrifie ainsi, selon Yazid Sabeg, la rénovation urbaine, pourtant qualifiée de « priorité fondamentale » en faveur des quartiers populaires.
Cumul des retards, insuffisance des ressources budgétaires, impossibilité de tenir les promesses faites au départ du programme en 2003… Autant de faits mis en avant par le comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU, dans un rapport, qui devrait être rendu public à la fin du mois. « Les trois quarts des crédits de l’agence ont financé la moitié des objectifs du programme », note-t-on dans le document, soit plus de 9 milliards d’euros sur les 12 milliards attribuables par l’ANRU d’ici à 2013.
Il n’empêche, cette somme additionnée aux aides des collectivités locales et des organismes HLM n’a permis de financer que 45,3 % des démolitions, 42 % des reconstructions, 54,4 % des réhabilitations et 62 % des résidentialisations. « Il est donc probable que les crédits disponibles ne permettront pas d’atteindre les objectifs du programme », souligne le rapport. Laissant ainsi de nombreux quartiers et villes populaires dans une situation de délabrement avancé, provoquant la colère et le désaveu des élus et des habitants.
L’inquiétude est d’autant plus vive que la planification au 31 décembre 2007 « révise à la baisse les objectifs quantitatifs fixés par la loi de programmation de la cohésion sociale de 2005 (…). L’objectif de 250 000 démolitions a été réduit à 130 000, ce qui pourrait entraver l’objectif de diversification de l’habitat », s’alarment les auteurs du rapport.
« C’est l’attitude de l’État qui est problématique : il se désengage des politiques de développement urbain depuis des années, explique Yazid Sabeg. S’il y a un domaine où il faut plus d’État, c’est bien celui-ci. À l’État d’être porteur de l’intérêt général, de combattre la séparation spatiale croissante entre les populations, de veiller à une juste allocation des ressources. » Le désengagement financier de l’ANRU et la réforme de la dotation de solidarité urbaine, qui est aujourd’hui seulement suspendue, prouvent le désintérêt total du gouvernement pour les quartiers populaires relégués.
« On manque à la parole donnée »
Ni les révoltes de 2005 ni les émeutes sporadiques qui ont suivi n’ont permis de tirer une quelconque leçon. Ce que confirme la faiblesse du « plan banlieue » de la secrétaire d’État Fadela Amara. « La révolte va s’inscrire dans le paysage français, prédit même Yazid Sabeg. On ne peut dire aux jeunes des quartiers qu’on a "un plan" et manquer à la parole donnée. »
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