« Maman, quand est-ce qu’on va avoir des papiers ? »
Sous les applaudissements, Mme M. est ressortie libre hier matin du commissariat central du 5e arrondissement de Paris. La convocation judiciaire de cette jeune maman sans papiers (lire notre édition du 29 octobre) avait suscité l’indignation des associations de défense des sans-papiers et des partis politiques de gauche, venus en nombre la soutenir devant le commissariat. Équatorienne de trente ans, Mme M. avait reçu il y a quelques jours une convocation dont le motif ne laissait aucun doute sur le zèle des fonctionnaires de la mairie du 5e arrondissement : « Suite à l’inscription de votre enfant à l’école et votre situation alors irrégulière en France… »
carte de séjour refusée
Mme M. est donc ressortie libre après plus d’une heure d’audition, qui a fait craindre le pire aux militants qui attendaient dans le froid. « Elle aurait pu être interpellée et mise en garde à vue », confirme l’avocate du collectif de vigilance Paris 12, Sylvie Boitel. Dans un communiqué, la préfecture de police indique qu’elle va examiner « avec attention » sa situation administrative. « Une femme policier m’a demandé si j’avais fait des démarches pour être régularisée », témoigne l’intéressée, qui s’est vu refuser deux demandes de carte de séjour depuis son arrivée en France en 2002. Une troisième demande a été déposée mercredi à la préfecture de police de Paris dans le cadre de la régularisation par le travail. Ses trois employeurs, chez qui elle garde les enfants et fait le ménage, lui ont délivré des promesses d’embauche.
Responsabilités
de chacun
Dès mercredi, Bertrand Delanoë, maire socialiste de Paris, demandait l’ouverture d’une enquête administrative « afin d’établir précisément les responsabilités de chacun dans la conduite de ce dossier ». Interrogé sur l’affaire par France 2, le ministre de l’Immigration indique qu’il n’y a pas de nouvelles consi- gnes données aux fonctionnaires. Mais Brice Hortefeux a beau s’en défendre, cette affaire suscite l’inquiétude des associations qui redoutent que l’école, l’un des derniers espaces protégés pour les sans-papiers, soit désormais le nouveau terrain de chasse de la politique du chiffre…
En attendant la lettre qui devrait l’informer des suites données à cette affaire, Mme M. s’inquiète, pour l’heure, de son droit à l’image. À la sortie du commissariat, les caméras étaient venues en nombre cadrer en gros plan le visage d’une femme qui ne cessait de répéter qu’elle souhaite rester anonyme… « Mon fils m’a vue à la télévision, disait-elle hier dans l’après-midi. Il se demande ce qui se passe. Ça l’inquiète. Il m’a dit : "Maman, quand est-ce qu’on va avoir des papiers ?" »
Marie Barbier
l' Huma du 31 / 10 / 08
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