L’invitée de la semaine Danielle Follet
Le risque d’une forte déception
Barack Obama a été élu sur les mots d’ordre de changement et d’espoir. Et une grande partie du peuple américain, comme le reste du monde, sait à quel point le changement est nécessaire.
Or, nous aurons davantage
de continuité que de rupture tant au niveau de la politique extérieure qu’au niveau national. C’est ce qu’indique déjà l’invitation faite
à Robert Gates, secrétaire de la Défense sous Bush,
de rester à son poste. Sur le plan économique, la première action du président élu, avant même son investiture,
a été de demander la mobilisation de la seconde moitié
des fonds du Plan Paulson - 350 milliards de dollars - alors que chacun s’accorde à reconnaître que les dépenses de la première moitié constituent un échec total. Il est possible qu’une partie de cet argent soit utilisée pour aider les gens à éviter les saisies immobilières. Mais nous savons aussi que la plus grande part sera déversée dans le trou noir des banques, pour éponger encore leurs pertes, sans contrepartie et sans pouvoir exiger qu’elles fassent circuler cet argent dans l’économie. Depuis des décennies, le pays vit sur la consommation à crédit, avec un déficit commercial de 2 milliards de dollars par jour désormais, et une production industrielle en grande partie délocalisée. Tant que le crédit était facile, les États-Unis ne s’inquiétaient pas de vivre en consommant plus qu’ils ne produisent. Aujourd’hui, l’équipe Obama comprend que la crise aiguë actuelle nécessite une intervention gouvernementale de l’ordre d’une chirurgie lourde et urgente. Donc avant
la mi-février, on aura un nouveau plan de relance,
de quelque 800 milliards de dollars, ce qui doit créer entre 3 et 4 millions d’emplois. Une excellente idée, même
si ça ne suffira pas. 60 % de cette somme sera allouée
à des dépenses keynésiennes, sauf que 95 % de celles-ci prendront la forme de contrats avec des entreprises privées, selon le modèle des contrats militaires. Comme
le keynésianisme militaire, cela se prêtera à une corruption et à un gaspillage inouï, cela d’autant plus que
les instances régulatrices ont été détruites par la politique gouvernementale de ces dernières années. Par ailleurs,
les 40 % restants seront utilisés pour des réductions de l’impôt sur les sociétés. Or, une telle mesure ne crée ni emplois ni activité économique ; elle ne bénéficie qu’aux patrons. Le New Deal créait des emplois par des dépenses publiques directes,
et non par des contrats privés. Espérons qu’Obama
ne se révèle pas plus proche de Bush que de Roosevelt…
l'Huma du 20 / 01 / 09
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