publié dans : coups de gueule et témoignages
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Cher Xavier,
j'aborderai les deux thèmes qui t'intéressent : les rapports, que l'on va rapidement appeler noirs/blancs; le climat socio-psychologique.
D'abord, la répression n'est pas au programme et ce grâce à une nouveauté dans l'histoire des mouvements sociaux en Guadeloupe: la discipline des manifestants et la maîtrise du mouvement par les responsables syndicaux (je te rappelle que le mouvement, s'il est contrôlé par les principaux syndicats, est composé d'une cinquantaine d'organisations sociales, politiques ou culturelles).
Au lendemain du départ du ministre, un nouveau tournant dans la chronologie du mouvement s'est opéré: les gens sont choqués, tendus et ne croient plus dans l'Etat. Aujourd'hui, plusieurs milliers de personne ont manifesté dans le calme à Pointe-à-Pitre et les élus de l'île soutiennent désormais officiellement le mouvement.
Mais malgré cela, il faut souligner que le réel problème dans les négociations est le patronat. L'Etat a concédé des choses; le patronat, lui, exige que toute augmentation de salaire soit compensée par une baisse sonnante et trébuchante des charges. Ils refusent de lâcher quoi que ce soit, quel qu'en soit le prix pour la paix sociale. Ce sont les seuls à ne pas avoir bougé depuis 21 jours; ils ont même établi un cahier de revendications pour demander de l'argent! Dans la salle de réunion, il n'y avait d'ailleurs que des blancs. Saisissant… Je n'éxagère aucunement en te disant que l'économie est toujours administrée par des esclavagistes, qui fonctionnent exactement comme leurs aïeux et qui se servent du racisme pour continuer d'exercer un pouvoir sans partage. Il est évident, en observant les faits, que l'Etat libéral n'a aucun autre rôle que de servir ces intérêts (tous ces discours me semblaient abstraits, je vois aujourd'hui les mécanisme se dérouler sous mes yeux).
Cependant, je ne crois pas que mes jours soient en danger à cause de ma couleur. Les syndicats indépendantistes les plus radicaux manient certes le paradigme racial pour expliquer l'organisation de la société “coloniale”, mais si ces termes lepénistes me gênent, les remarques n'en sont pas moins pertinentes et irréfutables (les patrons recourent souvent aux boîtes d'intérim parisiennes pour embaucher des cadres européens; les nègres font les boulots les moins bien payés et les travailleurs sans papier haïtiens ne sont pas légion dans le bâtiment et l'agriculture). Mais là aussi le mouvement est inédit. Les métropolitains, autrefois systématiquement perçus comme privilégiés, appartiennent pour une bonne partie à ces classes moyennes partout paupérisées. Les gens ne sont pas hostiles aux blancs, même s'ils cherchent parfois à te couillonner pensant que tu es touriste. La tension ne se porte plus sur les “petits blancs” ou les métropolitains comme autrefois mais sur les dirigeants considérés comme des profiteurs (le collectif s'appèle “lyannaj kont pwofitasyon”), et force est de constater que ces dirigeants sont des “grands blancs” et des métropolitains (Etat, investisseurs…). J'espère avoir répondu à tes questions, je file désormais faire des crêpes à ma petite famille. A ton sevice pour toutes les précisions que tu souhaites. Bonjour à Hélène. Fabrice
Blog P.C.F ARRAS
mardi 10 février 2009
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